Home ProcessEssays Entretiens complexitys : #7 Lorenzo Giacomini et la dérive de l’hybride

Entretiens complexitys : #7 Lorenzo Giacomini et la dérive de l’hybride

by HDA Paris

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Stonehenge, England (“Arché”) – Photo: chrisangle, Flickr
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Questo post, in francese, è accompagnato da tre video, un PDF e altri contenuti in italiano
Ce post, en français, est accompagné par des videos, un PDF,  et d’autres contenus en italian
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Nous reprenons notre cycle d’entretiens autour des sujets de l’architecture, l’ingénierie, la complexité et l’innovation.
Après des architectes, designers, artistes, c’est maintenant le tour d’un philosophe.
J’ai rencontré Lorenzo Giacomini au Politecnico di Milano en avril 2010 en occasion de la conférence Urban Hybridization, organisé par le prof. Zanni.
Avec le groupe #thinkark, nous avions était invité pour présenter l’article URBAN APERTURE(S) >< POROSITY AS A NEW MODEL FOR HYBRID PUBLIC SPACE. Par ailleurs vous avait peut-être vu notre série de posts sur l’architecture hybride, dans lesquelles nous avons raconté l’intervention de Lorenzo à la conférence, qui « a su expliquer comment, aujourd’hui, la notion d’hybride ne se réduit pas à un critère esthétique, mais elle s’affirme comme une véritable catégorie ontologique, c’est à dire une “propriété générale de tout ce qui est”. L’hybridation n’est pas alors qu’une spéculation ou bien une simple lecture du réel, mais elle constitue plutôt une caractéristique du monde contemporain. »
Dans l’entretien, réalisé par skype entre Milan et Paris, il revient sur ce point. Dans l’extrait ci-dessous, Lorenzo nous explique – en italien – comment et pourquoi l’hybridité semblerait être une caractéristique structurante de la discipline architecturale.

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Steven Holl Architects, Linked Hybrid, Beijing, Chine 2009
Henri Matisse, Danse, 1910
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Parmi les nombreuse réflexions, j’ai spécialement apprécié le discours sur la figure de Frank Gehry. Je dois avouer que Lorenzo nous ouvre une interprétation de cet architecte assez originale, loin des clichés que nous avons l’habitude d’entendre dans les milieux d’architecture. Pour Lorenzo, Gehry représente une figure qui dépasse totalement les archétypes de l’architecture traditionnelle, un artiste capable de mobiliser les efforts d’une équipe d’architectes, ingénieurs et spécialistes pour la réalisation de ses sculptures à l’apparence chaotique et sans un sens.
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Sketches of Frank Gehry, de Sydney Pollack, USA 2005
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Gehry a été capable, explique Lorenzo, de bouleverser les rapports traditionnels entre l’architecture et l’ingénierie. En effet, ceux qui pourraient apparaitre comme deux domaines séparés ou contradictoires (la liberté de l’architecture versus les contraintes de l’ingénierie), deviennent clairement, avec Gehry, deux aspects liés par la nécessite de la réalisation. Gehry n’existerait pas sans une réinvention de la technologie de l’architecture.  Ce qui était du domaine de la technique, vue comme une nécessité limitant la créativité, devient condition nécessaire pour l’action d’une liberté créatrice déchainée.
Dans ce sens, Gerd Binnig qui explique comment « les évolutions ont une structure quantique et fractale pour ce qui concerne leur organisation spatiale et temporelle. (…) Les différents sciences, qui semblerait diverger à partir d’une origine commune, pourraient de nouveau se rencontrer dans une théorie généralisée de l’évolution. »
Ceci est le point centrale du discours de Lorenzo, qui d’ailleurs titre cet article: le monde, la culture et la société seraient en train d’avancer vers une dérive de l’hybridation, selon ce processus fractale décrit par Binning qui expliquerait la reproduction d’un même fonctionnement à des niveau  et dans des domaines différents, comme la géologie, la linguistique, la culture, les savoir-faire…et, bien sur, l’architecture: celle-ci serait en train de revenir, par un processus de dérive, à une situation qui ressemble à celle d’origine – « Arché » – tout en étant enrichie par l’évolution culturelle et technologique dont elle est porteuse.
A ce propos, une référence à l’entretien à Hugh Dutton apparait significative, puisque Hugh cite des exemples d »architectes originaires » tels que Brunelleschi (l’homme architecte et ingénieur au même temps), en expliquant son regard critique envers l’“état d’éloignement” de ces deux professions, “comme un couple dont les partenaires ne se parlent plus” et que à l’agence nous travaillons ensemble, architectes et ingénieurs, avec la vision d’une réconciliation de la créativité avec la technique.
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« The Supercontinent Cycle »: fragmentation, dispersion, dérive des continents
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Avatar, de James Cameron, USA 2009
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Cette idée de la dérive de l’hybridation a amené Lorenzo à citer le film Avatar, dont nous avions déjà parlé ici, et qui se prête bien pour traiter le point centrale de la question éthique de l’hybridation, qui renvoie au rapport entre l’homme et la nature. Lorenzo explique, dans l’extrait ci-dessous -encore en italien-, qu’il est à son avis fondamentale de séparer le discours théorique du discours éthique. En effet, l’hybridation peut aussi représenter un phénomène négatif.
Justement, dans Avatar, l’hybridation est représentée comme une projection utopique – le rêve d’une population qui vit en réseaux et en symbiose avec la nature – et, au même temps, comme un processus dramatique – les humains qui utilisent les technologies les plus poussées pour exercer leur domination -.

A la fin de l’entretien, Lorenzo nous surprend avec sa réponse à la dernière question « est-ce que tu aimes les architectes? 🙂 ».
« J’aime bien les architectes…c’est les architectes qui ne s’aiment pas entre eux… » et avec cette phrase il ouvre le débat sur l’origine de la rivalité entre les architectes qui serait due, entre autre, aux dangers liés à la séduction du pouvoir, à laquelle l’architecte serait toujours exposé.

Ce post résumé une conversation très intéressante et agréable durée environ une heure, pour laquelle je remercie énormément Lorenzo Giacomini, qui nous a consacré son temps dans le seul but de faire avancer cette recherche.
Si vous êtes intéressés à en savoir plus, et si vous parlez italien, l’intégralité de l’entretien est disponible, divisée en 6 parties, aux liens suivants:
parte 1/6
parte 2/6
parte 3/6
parte 4/6
parte 5/6
parte 6/6

Lorenzo a aussi réalisé un très riche support d’entretien en italien/anglais, [download id= »8″], que vous pouvez télécharger ou visualiser ci-dessous. Il contient une petite biographie, une bibliographie thématique, des citations et d’autres informations sur la notion d’hybride en architecture.


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Les thématiques traitées dans ce post seront reprise et approfondies, à partir de septembre, dans la section Urban Hybridisation du blog Ecosistema Urbano, dans le cadre d’une collaboration entre cette agence d’architecture et le Politecnico di Milano.

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